Quatre femmes, quatre récits musicaux : soirée spéciale Ensemble ∞ Podcast

Pour la spéciale de ce jeudi 22 avril, dès 18h Station Station invite Ensemble, un podcast conçu comme une collection de créations sonores et personnelles d’artistes partageant leur vision du monde et de ses mutations. Ensemble souhaite offrir aux artistes l’espace et la liberté nécessaire pour repenser nos imaginaires. Initialement prévu à l’écoute pour le festival Maintenant 2020, Ensemble cherche à proposer un nouveau format pour présenter des créations d’artistes dans le contexte sanitaire qui les empêche de se produire en live physique. L’envie d’offrir un espace aux artistes pour partager des récits musicaux plus personnels sur ce que nous vivons mobilisent Arnaud Briens, Florine Rupin et Gaëtan Naël de l’association Electroni[k].

 

 

A l’occasion de la diffusion des quatre premiers épisodes, Arnaud Briens, membre du comité de programmation musicale du festival Maintenant et d’Ensemble Podcast, a bien voulu répondre à nos questions.

 

Arnaud, est ce que tu veux bien nous présenter l’équipe qui porte le projet du podcast ? 

Nous sommes une équipe de trois personnes. Gaëtan, qui est président de l’association Electroni[k], programmateur du festival Maintenant, basé à Rennes, et qui a formulé les premières idées. S’il a un rôle de superviseur, ce sont surtout Florine (Rupin) et moi qui travaillons sur le projet. Florine est à la communication (nationale et internationale), en ce qui me concerne, je suis responsable de la programmation des podcasts Ensemble en plus d’être bénévole pour l’association Electroni[k] dont j’ai rejoint le Conseil d’Administration en 2017. Pour Ensemble comme pour le festival, je me concentre sur la partie programmation musicale et la sélection SHAPE*, qui est un regroupement de 16 festivals européens qui met en avant des talents émergents. Je produis différents podcasts pour présenter la programmation musicale du festival et donner aux publics un avant goût des concerts de l’évènement.

 

De la radio au festival : quel a été ton chemin Arnaud ? 

Originaire des Côtes d’Armor, j’ai commencé par produire des émissions pour la radio associative Radio-activ’. Cela m’a permis de rencontrer certains membres d’Electroni[k]. Par la suite, j’ai continué de produire d’autres podcasts pour des radios et des festivals, par pur plaisir, parce que j’aime ça et que je mixe pendant mon temps libre. Cela me permet de réunir ma passion pour la musique et mon besoin de faire des festivals dans le monde entier. Depuis la fin des années 2000, je voyage un peu partout en Europe et au-delà pour écouter ce qui se fait de bien. C’est en grande partie grâce à cela que j’ai trouvé ma place dans l’asso, sur la programmation musicale en discutant avec Gaëtan, avec qui je partage des goûts musicaux similaires.

Upsammy – Théâtre du Vieux St-Étienne – festival Maintenant 2019 © Gwendal Le Flem

Dans Ensemble : qu’est ce qui vous a particulièrement tenu à cœur ? 

On parle de podcasts depuis longtemps mais on avait le sentiment que tous les podcasts se ressemblaient, que c’étaient souvent des artistes associés à des labels ou des distributeurs qui étaient mis.es en avant dans un but publicitaire. Nous cherchions à sortir de ce cadre promotionnel et de copinage pour proposer une création originale. Ensuite, la crise sanitaire est arrivée, on a alors décidé de proposer des podcasts dans lesquels les artistes pourraient dire quelque chose de plus personnel. Au cœur de toutes ces crises sociales, économiques, écologiques, nous traversons des expériences particulières : c’était l’occasion pour les artistes de s’exprimer sur ce qu’iels vivent et nous de leur donner cet espace. Mais ce n’est pas quelque chose qui est fixé dans le temps ou l’espace immédiat, nous encourageons les artistes à parler de ce qu’iels veulent. Ielles peuvent parler de choses passées comme d’un futur possible. Ça peut être à propos d’un événement, d’un souvenir… On veut offrir la possibilité aux artistes de s’exprimer là où iels n’ont pas l’habitude de le faire, et que ça soit plus personnel.

En termes de choix artistiques, nous souhaitons varier les genres, la diversité géographique, les âges. Les quatre premiers épisodes mettent en avant des femmes, mais le prochain sera consacré à l’artiste kényan Joseph KMRU. On se situe donc pas dans un line-up en non mixité pure mais les questions de parité et de représentations des artistes femmes ou afab sont centrales pour nous. 

Par ailleurs ce qui nous intéresse également ce sera le parcours artistique, l’ouverture sur d’autres disciplines, l’engagement politique et sociétale, la notoriété, le fait que les artistes soient producteur.ice de musique. Ce dernier point n’est pas négligeable, produire leur musique leur permet de proposer une pratique personnelle, située et parfois d’inclure une track en exclusivité. Un dernier élément majeur qui a été important pour le lancement du projet et le choix des premiers artistes, a été leur présence dans SHAPE. Avec la crise sanitaire c’était difficile de faire jouer des artistes européen·nes et comme nous rémunérons les artistes pour la production de leurs podcasts nous nous sommes engagé.e.s pour présenter des artistes SHAPE dans ce nouveau cadre / format. 

Crystallmess – Théâtre du Vieux St-Étienne – festival Maintenant 2019 © Valentin Crevat

 

Les artistes prennent-iels la parole dans le podcast ? 

Ça dépend des artistes, iels peuvent proposer des histoires plus ou moins abstraites. Sur les trois premiers podcasts, il y a des paroles, parfois des artistes elleux-mêmes, des ami.es d’artistes, des interviews qui sont passées à la télévision etc. Je pense à Crystallmess notamment qui a choisi des extraits d’interviews de rappeurs américains sur la chaîne MTV. D’autres seront plus abstraits, comme Upsammy qui a choisi de réciter des poèmes ou comme Joseph KMRU dont la création est constituée uniquement de field recordings (paysages sonores). Ensemble offre une carte blanche à l’artiste pour qu’iel nous raconte quelque chose, pas nécessairement par la parole mais par des sons, un récit musical qui peut être abstrait. Ce n’est pas situé dans le temps, ça peut être un souvenir de jeunesse ou une projection du monde de demain. Les artistes peuvent utiliser toutes les sources sonores possibles : un vieux disque, la dernière tendance, du field recording, des extraits audio, des morceaux symboliques… Nous leur fournissons l’espace pour raconter ce qu’iels vivent, dans notre contexte actuelle. 

 

Est-ce qu’il y a une continuité entre le festival et le podcast ? La programmation de Maintenant est pluridisciplinaire : est-ce que vous comptez inviter des artistes plasticien.nes pour le podcast par exemple ? 

Pour l’instant, nous réfléchissons uniquement à des artistes qui ont une pratique musicale pour le podcast, nous voulons que les gens puissent l’écouter d’une oreille un peu distraite, comme un fond musical, mais également avoir une écoute plus profonde en se laisser porter et plonger dans la création. Nous ne ferions pas d’interview d’une heure par exemple, ce n’est pas notre ligne éditoriale. Il y a une base musicale et si les artistes décident de faire autre chose à côté, c’est super. 

Il y a un lien fort entre le festival et la série de podcasts, puisque l’objectif est le même : soutenir la création, penser la diffusion de ces créations et qu’elles puissent rencontrer un public. Aussi, les artistes que nous repérons peuvent arriver sur l’une ou l’autre de ces deux entrées, suivant ce qu’ils ont à dire, à montrer, à partager.  

Par contre, le format d’écoute et le cadre sont complètement différents dans ces deux projets : Pour Ensemble, il ne s’agit pas d’un temps fort mais d’instaurer une régularité, le cadre de présentation et de rencontre du public est complètement nouveau pour nous (en ligne, radiodiffusion…)

Mais c’est vrai qu’avec cette série de podcasts, nous cherchons peut-être plus spécifiquement à dédier un espace pour questionner les mutations du monde, exprimer des récits individuels ou collectifs qui témoignent de ce que nous vivons aujourd’hui, qui construit un référentiel commun et qui nous permet de faire société, faire et être ‘ensemble’, finalement. Par exemple, nous avons invité Maria Teriaeva, qui est une artiste russe. Nous voulions la faire jouer au festival mais ce n’était pas possible. On a quand même pris contact avec elle et en discutant on s’est rendu compte qu’elle avait une histoire à partager, des choses à raconter en lien avec le contexte sanitaire qui l’avait tout particulièrement impacté, tombé entre la sortie de son disque et une tournée prévue. Entre ces deux moments temporellement proches, un monde a complètement basculé, c’est très fort : le podcast devenait le format idéal pour lui donner cet espace et faire finalement cette rencontre. 

Maria Teriaeva – crédit © Jenia Filatova 2017

 

Et justement est-ce que pour vous il y a un pont à faire entre l’événementiel et la radio ? Entre le festival et le podcast ? 

Nous avons des expositions sur le site du festival et typiquement on pourrait proposer des podcasts en écoute libre, en fournissant aux gens des tablettes avec la liste des podcasts durant l’événement. En termes de radiodiffusion, ce n’est pas quelque chose qui a été discuté mais le festival étant en octobre, nous avons le temps d’y penser, surtout qu’il y a encore beaucoup d’incertitudes… 

L’artiste qui a produit le troisième podcast, Rojin Sharafi, nous a envoyé un mix de 2h40 – au lieu d’une heure – à cause d’un quiproquo et si la crise sanitaire ne nous permet pas de faire une édition “normale”, nous pourrions réfléchir à une diffusion de cette création pendant le festival par exemple. 

 

Pourquoi avoir choisi d’appeler la série Ensemble ? 

Pour nous Ensemble, c’est la somme de récits d’artistes. Dans notre podcast, il y a une grande variété d’âges, de genres, d’origines géographiques et Ensemble est cette collection de récits très personnels de ce que l’on vit actuellement, raconté au prisme de la différence.  

 

Retrouvez les quatre premiers épisodes d’Ensemble ∞ Podcast

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Par ici 

 

Derrière ce podcast, l’association rennaise Electroni[k] met en valeur depuis 2001 la création artistique contemporaine. Electroni[k] défriche les nouveautés et l’innovation dans le domaine du son, de l’image et des nouveaux médias à travers le festival Maintenant.

*SHAPE (Sound, Heterogeneous Art and Performance in Europe) est une initiative cofinancée par le programme Europe Créative de l’Union Européenne.